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         Bien vite, des batraciens aux têtes aplaties se rassemblèrent et coassèrent en rythme avec la mélodie. Tapant de la patte contre la surface de l’eau, ils créèrent un véritable orchestre sur des tons jazzy me rappelant la belle époque américaine. Je commençais à taper dans les mains pour rajouter un peu percussions lorsque Jylénia vint me surprendre. Le cri que je lâcha à ce moment stoppa net la musique, faisant fuir les insectes et la plupart de ces crapauds. L’un d’eux s’était jeté à l’eau pour remonter sur une pierre de l’autre côté de la rive, examinant attentivement notre trio, certainement pour s’assurer que nul danger ne planait sur lui. La dryade s’excusa auprès de moi, puis auprès du batracien qui finit par s’approcher de nouveau lorsqu’elle lui tendit la main. Se dernier se laissa caresser le dos avant de se lever sur ses pattes arrières, prenant entre ses membres avant la main de la jeune femme qu’il embrasa en coassant sourdement. Puis il repartit d’un bond dans l’eau.

         J’étais étonné, dans un premier temps, de cette prouesse inattendu, puis je finis par rationaliser la chose en pensant qu’une dryade devait être très proche de la nature et des animaux de par son origine. Elle se releva et m’expliqua que nous pouvions désormais descendre la rivière. Instinctivement, je portais mon regard sur les alentours pour trouver une quelconque embarcation, en vain. Allions-nous descendre le cours d’eau à la nage ? Où bien l’une d’elle allait pouvoir se transformer en un poisson ou bateau ? Je ne comprenais pas bien et cela amusa la jeune dryade qui comprenais toute l’ampleur de mon doute. Elle ne souffla pas un mot et se dirigea vers l’arbre avec lequel elle s’était adonné à son petit rituel magique. Elle posa sa main droite sur l’écorce puis scanda quelques incantations dans une langue que je ne comprenais pas. En tendant l’oreille, je décelais des syllabes harmonieuses mais très peu de lettres, cela ressemblait d’avantage à une série de sons divers avec quelques intonations qui me faisait penser à de l’elfique. Après une bonne dizaine de secondes, l’arbre se mit à frissonner, l’écorce se tordait vers l’extérieur jusqu’à former une protubérance collée à la paume de la dryade. Celle-ci écarta alors sa main, l’écorce suivit son mouvement, comme attiré, se dessinant comme l’avant d’un canoë. Petit à petit, l’embarcation se forma dans son intégralité, posée sur un lit de pétale de cerisier qui le guida jusque sur le lit de la rivière, en toute délicatesse. Afin que le courant ne l’emmène au loin, une solide corde de pétale l’arrima à la rive.

         Une fois l’arbre de nouveau solide, j’applaudis avec enthousiasme, n’y comprenant rien malgré la beauté du geste. Pour seule explication, Jylénia me raconta que l’arbre en question avait « offert » ce canoë de bon coeur. Personnellement, je n’y voyait la que la magie de la dryade et n’avait aucunement entendu l’arbre parler, mais qui étais-je pour jurer du peu que je comprenais ? Aussi j’acceptais, sans vouloir chercher d’avantage, et embarquais avec plaisir. Je ne voulais pas me perdre en détails inutiles à mes yeux, désirant profiter plus que de comprendre ces étrangetés. Vaïlyne vint s’asseoir devant moi, désirant être aux premières loges, place que je lui cédais volontiers pour ne pas être mouillé. Jylénia prit place dans mon dos, après avoir salué son compagnon feuillu. D’un petit geste du bras sur ma droite, les amarres de pétales roses se dispersèrent dans la brise et notre embarcation commença à partir.


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